Histoires et secrets de la Basilique Saint-Michel de Bordeaux
La basilique Saint-Michel de Bordeaux est la deuxième plus grande église catholique de la ville de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France. Construite entre le XIVe et le XVIe siècle, elle est un exemple remarquable du style gothique flamboyant. L’église a donné son nom au quartier dans lequel elle se trouve.
La basilique partage avec la cathédrale Saint-André la particularité d’avoir un clocher indépendant du sanctuaire, appelé campanile. Ce clocher, qui atteint une hauteur de 114 mètres, est le plus haut du Midi de la France et le quatrième plus haut de France, après la flèche des cathédrales de Rouen (151 mètres), de Strasbourg (142 mètres) et de Chartres (115 mètres). À sa base se trouve une crypte qui a longtemps servi d’ossuaire, puis de lieu d’exposition pour des « momies » exhumées au XIXe siècle lors de l’aménagement de la place Meynard, ancien cimetière paroissial.
Classée monument historique dès 1846, l’église Saint-Michel — devenue basilique mineure en 1903 — est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1998 au titre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France.
Histoire
L’actuel édifice succède à une ancienne église située « hors-les-murs », c’est-à-dire en dehors des remparts de la ville. La construction de la troisième enceinte urbaine, incluant l’antique sanctuaire, a contribué au développement du quartier au XIVe siècle. Ce quartier était alors le domaine des marchands et artisans, tels que charpentiers et tonneliers.
Le chantier de la nouvelle église fut confié par le roi Louis XI à l’architecte Jean Lebas, originaire de Saintes. En 1466, un collège de chanoines s’installa dans l’église, encore en construction. Elle devint une étape importante sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, comme en témoigne la chapelle Saint-Jacques. Confréries et corporations contribuèrent par des donations à l’avancement des travaux, qui ne furent achevés qu’au XVIe siècle.
L’édifice souffrit des conséquences du tremblement de terre qui frappa Bordeaux le 10 août 1759. La flèche du campanile fut emportée par un ouragan en septembre 1768, ramenant sa hauteur à 99 mètres. Un projet de restauration avait été réalisé en 1755 mais demeura sans suite. En janvier 1769, la fabrique de l’église décida de confier la restauration de son campanile à l’architecte du roi Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne. Cependant, ce projet n’eut guère plus de succès que le précédent faute de fonds suffisants, malgré une quête décidée en avril 1771. La reconstruction de la flèche attendra cependant 1860, date à laquelle Paul Abadie, architecte du Sacré-Cœur à Paris, entama les travaux dans le style gothique de l’édifice. Ils furent achevés en 1869.
Au début du XIXe siècle, le clocher, alors tronqué, accueillit le télégraphe Chappe. Lors de son passage à Bordeaux en 1843, Victor Hugo le décrivit en ces termes : « La tour, quoique couronnée encore d’un bloc à huit pans et à huit pignons, est fruste et tronquée à son sommet. On sent qu’elle est décapitée et morte. Le vent et le jour passent à travers ses longues ogives sans fenestrages et sans meneaux comme à travers de grands ossements. Ce n’est plus un clocher ; c’est le squelette d’un clocher. »
En 1791, le directoire du département ordonna la suppression de l’ancien cimetière paroissial entourant l’église, l’actuelle place Meynard. Les ossements furent entassés dans la crypte située sous le clocher, puis recouverts de terre. C’est au cours de ces travaux que furent découverts plusieurs dizaines de corps momifiés, les « momies de Saint-Michel ». Ces dernières furent placées dans la crypte, qui fut ouverte à la visite jusqu’en 1979. À cette date, les corps furent de nouveau inhumés, cette fois au cimetière de la Chartreuse.
En 1846, l’église paroissiale Saint-Michel fut inscrite à l’Inventaire des monuments historiques, et le 1er avril 1903, un bref apostolique en fit une basilique mineure.
Le 21 juin 1940, des bombardements soufflèrent une partie des vitraux de la basilique, qui furent remplacés après le conflit par des verrières modernistes dues à l’artiste Max Ingrand et, pour les chapelles du déambulatoire, à Jean-Henri Couturat.
En 1998, les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France furent inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, incluant les trois plus grandes églises de Bordeaux : la cathédrale Saint-André, la basilique Saint-Seurin et la basilique Saint-Michel.
Architecture
Mesurant 75 mètres de long du chœur à l’entrée de la nef pour 38 mètres de large d’un croisillon à l’autre, la basilique est l’un des plus grands lieux de culte bordelais. Caractéristique du style gothique flamboyant, elle présente un plan en croix latine à triple vaisseau. La nef, haute de 23 mètres, compte quatre travées et est entièrement couverte d’une voûte d’ogives oblongue, de même que les bas-côtés. Un large transept saillant sépare symboliquement la nef du chœur, formé de trois travées et qui reprend les dispositions de la nef. Trois absidioles polygonales ferment l’ensemble.
Les bas-côtés sont doublés d’une série de 17 chapelles latérales, chacune étant dédiée à une confrérie ou à une corporation. Nombre de ces chapelles conservent des œuvres d’art. Par exemple, la chapelle Saint-Jacques, construite de 1470 à 1475, possède un retable en bois du XVIIe siècle, orné en son centre d’un tableau représentant « l’apothéose de Saint-Jacques » (1632). La chapelle abrite également le tombeau d’un pèlerin, la chapelle étant dédiée aux jacquets en route vers Saint-Jacques-de-Compostelle. La chapelle de Ferron est ornée d’une composition sculptée reprenant le thème de la déposition de croix (1493). Une autre chapelle est dédiée à Sainte Catherine, patronne des mariniers.
Parmi les autres œuvres d’art que renferme la basilique, on trouve également une pietà datée de la fin du XVe siècle et une sculpture représentant Sainte Ursule abritant sous son manteau les vierges martyres de Cologne. Dans la nef, une chaire du XVIIIe siècle alliant bois d’acajou et panneaux de marbre est surmontée d’une statue de Saint Michel, patron de l’église.
Plusieurs dalles numérotées ou gravées situées dans la nef témoignent de la coutume consistant, pour les plus aisés, à se faire inhumer dans l’église. Cette pratique tomba en désuétude au cours du XVIIIe siècle pour des raisons de salubrité publique.
Les vitraux
De larges baies à remplage flamboyant éclairent la basilique. Les vitraux datent pour l’essentiel des XVIe, XIXe et XXe siècles. Parmi les plus anciens, on trouve un « arbre de Jessé » où dominent les tons rouges, jaunes et bleus. Les vitraux du chœur, réalisés par l’artiste Max Ingrand, remplacent des verrières du XIXe siècle détruites par les bombardements.
Orgues
Le buffet d’orgue, de style Louis XV, fut construit de 1762 à 1765 par Cessy et Audebert. Les grandes-orgues, œuvres de l’organier Micot, ont été restaurées à plusieurs reprises, et notamment reconstruites par Joseph Merklin en 1865. Elles comptent 41 jeux pour trois claviers et un pédalier.
En 2008, les grandes-orgues furent démontées pour être de nouveau restaurées. Cette tâche, confiée aux facteurs d’orgue Bernard Hurvy, Olivier Robert et Stéphane Robert assistés par Michel Jurine, fut achevée en 2011. L’inauguration de l’orgue restauré eut lieu le 16 septembre 2011 ; l’organiste Thierry Escaich y improvise et y interprète son concerto pour orgue et orchestre no 2 et le concerto pour orgue, cordes et timbales de Francis Poulenc avec l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine sous la direction de Pieter-Jelle De Boer.
Le buffet est classé par les monuments historiques en 1846, tandis que la partie instrumentale l’est depuis 1987. Le titulaire de l’instrument est Paul Darrouy.
Flèche Saint-Michel
Le clocher forme une structure indépendante du sanctuaire. Situé à plusieurs dizaines de mètres du portail principal, il est l’œuvre de l’architecte Jean Lebas. Cantonné de contreforts et de pinacles, il supporte une flèche ajourée édifiée de 1861 à 1869 par Paul Abadie. Haute de 114,60 mètres, la flèche Saint-Michel de Bordeaux est le plus haut clocher du Midi de la France.
Le campanile de la basilique Saint-Michel est doté d’un carillon de 22 cloches. Après restauration, le carillon est à nouveau fonctionnel depuis le 17 septembre 1999.
Depuis novembre 2020 et pour une durée de 5 ans, des travaux de restauration sont en cours sur la flèche.
La basilique Saint-Michel de Bordeaux demeure un témoignage exceptionnel de l’architecture gothique flamboyante et un lieu chargé d’histoire, de spiritualité et d’art. Son importance historique, culturelle et architecturale continue d’attirer les visiteurs et les fidèles du monde entier, contribuant à la richesse patrimoniale de la ville de Bordeaux.
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