La commune d’Ambès, discrète et singulière, se distingue par une particularité géographique rare : elle est la seule à posséder une rive sur la majestueuse Garonne et une sur la paisible Dordogne. Ce territoire unique, souvent méconnu des habitants de la métropole, révèle un charme insoupçonné. On ne se rend pas au Bec d’Ambès par hasard, car ce lieu constitue le point de confluence entre deux grands fleuves, à la naissance de l’estuaire de la Gironde. Entre marais préservés et industries omniprésentes, cette pointe de presqu’île offre une expérience hors du commun, un détour atypique à la découverte de contrastes saisissants.
Un paysage hors du temps
Yvan Detraz, architecte et directeur du collectif urbain « Bruit du frigo, » décrit le Bec d’Ambès comme un lieu où se mêlent nature et industrie, formant un ensemble composite et chaotique. Le village d’Ambès, paisible avec sa trame carrée, contraste avec les zones humides évoquant le Bayou de Louisiane, les industries émergeant à l’horizon et les châteaux évoquant un autre temps. C’est un paysage qui défie les attentes, une expérience authentique au cœur de cette langue de terre insulaire.
Le parc de Cantefrêne : une halte poétique
Une visite au parc de Cantefrêne offre une escapade poétique. Une mystérieuse cabane en bois, enlacée par une structure sinueuse émergeant des profondeurs, intrigue les visiteurs. Conçue par Candice Pétrillo du collectif Zébra3, cette installation artistique évoque la Vouivre, créature fantastique liée à des légendes locales. Le parc, étendu sur 65 hectares, témoigne de la reconversion réussie d’une ancienne gravière avec ses étangs pittoresques ouverts aux pêcheurs, ses aires de jeux, ses tables de ping-pong, son mini-golf, sa piste cyclable et son parcours santé.
Les marais du Bec d’Ambès : un trésor écologique
Les marais du Bec d’Ambès, couvrant plus de 2 600 hectares, s’étendent sur Ambès, Saint-Louis-de-Montferrand, Saint-Vincent-de-Paul et Ambarès-et-Lagrave. Classés Natura 2000, ils représentent un trésor écologique situé en dessous du niveau des plus hautes eaux. « Le Bec d’Ambès a le profil d’une assiette à soupe ! » explique Christian Vignaud Saunier, à la tête de l’association Claire Aubarède. Ces marais, malgré les défis posés par leur niveau élevé d’eau, créent des zones humides propices à une riche biodiversité, abritant des espèces telles que le papillon Cuivré des marais, la loutre, le vison d’Europe, l’angélique à fruits variables (flore endémique) et la tortue Cistude d’Europe. Les oiseaux migrateurs, tels que le tadorne de Belon, le héron cendré et la cigogne, en font un refuge hivernal.
Une histoire d’amour avec la raffinerie de pétrole
Entre 1924 et 1977, un profond changement s’est opéré sur la presqu’île d’Ambès, autrefois principalement agricole. Durant cette période, des éléments clés ont été érigés, transformant le paysage de manière significative. Une voie ferrée reliant Bassens à Bec d’Ambès a été mise en place, accompagnée de la construction d’un port, d’un dépôt d’hydrocarbures, d’une raffinerie de pétrole, et enfin, d’une voie rapide. En moins d’un siècle, cette presqu’île tranquille a subi une métamorphose impressionnante pour devenir une zone industrielle dynamique.
La rénovation du ponton d’Ambès a sonné le retour des bateaux de loisir. Dans les années 70-80, la Dordogne était fréquentée par de nombreux pêcheurs utilisant leur « conche » pour capturer des poissons tels que l’alose et la lamproie. Aujourd’hui, les bateaux de plaisance affluent principalement de Bourg, ravivant l’activité maritime de la région.
Le Bec d’Ambès, bien que souvent méconnu, dévoile un paysage unique, mêlant harmonieusement nature et industrie. Des lieux tels que le parc de Cantefrêne et les marais préservés en font une destination inattendue, offrant une expérience hors du temps. En explorant cette pointe de presqu’île, les visiteurs peuvent plonger dans un univers où l’histoire, la nature et l’art se rencontrent, formant un ensemble riche et captivant.
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